L’État libanais loue 300.000m2 au Golf Club of Lebanon à moins d’un dollar par an


Le gouvernement libanais a récemment augmenté la TVA. Il a aussi fixé le prix du valet parking à 10.000 livres (c’est à dire un peu plus de 6 dollars). Par contre, il loue plus de 300.000m2 en plein Beyrouth au Golf Club of Lebanon à, tenez-vous bien, 1.100 livres (moins d’un dollar) par an!

Selon MTV Lebanon, le Golf Club of Lebanon loue son immense terrain en plein de cœur de Beyrouth, plus de 300.000m2, à moins d’un dollar par an, et ce depuis 1963. Le contrat devait durer quinze ans mais est encore en vigueur plus d’un demi-siècle plus tard. Ce contrat hallucinant aurait été renouvelé par le gouvernement de Fouad Siniora en 2006, puis tout simplement ignoré par ses successeurs au Grand Sérail.





Le gouvernement actuel a augmenté la TVA pour pouvoir financer la nouvelle grille des salaires de la fonction publique, sous prétexte que les caisses de l’État sont vides. Mais il continue à louer un terrain qui appartient au ministère des Travaux publics à un prix ridicule, se moquant du tiers comme du quart des caisses de l’État et des finances publiques.

En plus, il a eu l’outrecuidance de fixer le prix du valet parking à Beyrouth à 10.000 livres libanaises. Et comme ces valets parking sont partout et qu’il est devenu presque impossible de se garer le soir à Beyrouth sans faire appel à leurs services, n’importe lequel d’entre nous devra désormais débourser un peu plus 6 dollars s’il ou elle a la malheureuse envie de vouloir mettre le nez dehors. Pendant que les nantis s’amusent à jouer au golf sur un terrain de 300.000m2 loué à moins d’un dollar par an…

Vue aérienne du Golf Club of Lebanon à Beyrouth

C’est autrement plus choquant quand on connaît le prix exorbitant du mètre carré dans la capitale libanaise. Un prix qui force de nombreux beyrouthins à déménager et à s’installer dans des banlieues beaucoup moins onéreuses.

Selon la Lebanese Food Bank, près d’un million et demi de Libanais vivent sous le seuil de pauvreté. Plus de 30% de la population. Mais visiblement ce n’est pas assez pour les affairistes qui nous gouvernent. Ceux-là mêmes qui nous obligent encore à payer trois factures d’eau (celle du robinet, celle des citernes et celle potable en bouteille), deux factures d’électricité (celle de l’électricité et celle du générateur), sans compter les factures astronmiques de téléphone et d’internet. Tout en repoussant aux calendes grecques la promesse de jours meilleurs et moins chers.

Source : Lebanese Food Bank

Comme si leur mission était d’appauvrir le plus de Libanais possible tout en faisant des largesses aussi spectaculaires qu’obscènes aux plus riches d’entre nous.

Aujourd’hui deux questions se posent. La première coule de source : que fait Nicolas Tueni, le ministre en charge de la lutte contre la corruption? S’il pouvait feindre l’ignorance du contrat révoltant du Golf Club of Lebanon, aujourd’hui il n’a plus aucune raison de rester les bras croisés. La seconde, sans doute la plus importante des deux : pourquoi les Libanais continuent à se taire et à accepter l’inacceptable?

Je ne préconise évidemment pas la fermeture du Golf Club, ni sa location au prix du marché, ce qui équivaudrait à terme, ne nous leurrons pas, à bétonner l'un des derniers espaces verts de la capitale et à engraisser les promoteurs immobiliers. La solution la plus citoyenne serait de transformer ce club exclusif en jardin public. Une sorte de Hyde Park beyrouthin. Où les Libanais, jeunes et vieux, riches et pauvres, pourraient échapper un peu à la laideur du béton conquérant.


© Claude El Khal, 2017