L’article 522 relatif au viol bientôt abrogé par le Parlement?


L’ONG Abaad a lancé la semaine dernière une campagne de communication appelant à l’abrogation de l’article 522 du Code pénal. Leur timing était parfait. Le Parlement libanais s’apprêtait justement à le faire et à en finir avec cet article de loi d’un autre âge. Mais un obstacle de taille, qui n'a pourtant aucun rapport avec l'article 522, pourrait retarder son abrogation.

Peu de Libanais connaissaient l’existence de l’article 522 qui permet à un violeur de suspendre sa peine s’il épouse sa victime. Une campagne de communication lancée par l’ONG Abaad demandant son abrogation a comblé cette lacune. Un spot d’une terrible efficacité, créé par l’agence de publicité Leo Burnett et réalisé par Danielle Rizkallah, a fait en quelques jours le tour des réseaux sociaux et la une des journaux télévisés.



Il ne pouvait, pour ainsi dire, pas mieux tomber. Suite à une proposition de loi déposée par le député Elie Keyrouz, le Parlement libanais s’apprêtait à abroger cet article infamant. "La commission parlementaire qui planche déjà depuis plusieurs semaines sur le projet de loi doit se réunir à nouveau mercredi 7 novembre pour enfin annuler les effets relatifs au viol de l’article 522", assure le député Ghassan Moukeiber, fervent partisan de cette annulation.

Malheureusement, même si elle est votée en commission, cette abrogation devra attendre la prochaine séance plénière du Parlement pour être officielle. Alors que les commissions parlementaires peuvent se réunir à tout moment, les séances plénières sont du ressort exclusif du président du Parlement. Et il est très peu probable que ce dernier convoque les députés à telle séance avant la formation du nouveau gouvernement.

Un mois après l’élection de Michel Aoun à la présidence de la République et la nomination de Saad Hariri comme Premier ministre, le nouveau gouvernement n’a toujours pas vu le jour. Sa naissance pour le moins difficile est retardée par un marchandage digne des pires souks orientaux. Au grand dam des Libanais qui espéraient un nouvel élan après des années de blocage institutionnel.

La solution se trouve aujourd’hui, nous dit-on, entre les mains de l’incontournable et inamovible président du Parlement, Nabih Berri. Celui-là même qui a le pouvoir de convoquer la séance plénière pour officialiser l’abrogation de l’article 522, bientôt votée par les députés réunis en commission parlementaire.

Ce n’est pas la première fois que le système confessionnel libanais et le partage clanique du pouvoir démontrent leur inefficacité, voire leur absurdité. Espérons que les prochains jours verront un sursaut des consciences et une conclusion heureuse à la formation du gouvernement et à l’abrogation de l’article 522, dont les destins sont, semble-t-il, indissociables.


© Claude El Khal, 2016